Comment perdre l’intégrité d’un objet au musée ?

En le disséquant pour mieux le comprendre ? C’est ce que nous raconte ce chasse-mouches, amulette propitiatoire, décousue, éventrée et fragmentée. Elle a été, en effet, vidée de sa charge magique, qui était constituée, d’après le registre d’inventaire du Musée en 1953, d’une lame de couteau, d’une pièce de cuir et de cinq feuillets coraniques. Les deux premiers éléments ont disparu. Les prières et formules magiques manuscrites, dépliées, ont été reléguées dans un tiroir destiné aux oeuvres en deux dimensions. En 2018, le lien est enfin rétabli entre le chassemouches à la blessure béante et ces textes marqués de leurs plis d’origine, retrouvés sans documentation aucune sur leur appartenance initiale à l’amulette qu’ils devaient activer. Le registre d’inventaire original stipule que le souverain asante Kofi Karikari lui-même aurait offert le chasse-mouches au missionnaire Ramseyer alors qu’il le retenait comme prisonnier politique à Kumasi (capitale de l’Empire asante au Ghana) entre 1869 et 1874. Cette information n’est pas corroborée par le Journal corédigé par les pasteurs otages.

Floriane Morin/MEG
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