Colonialisme et anthropologie à Genève
Anthropologie et empires coloniaux
Caroline Montebello, doctorante en histoire à l'Université de Genève
Caroline Montebello, doctorante en histoire à l'Université de Genève
Dans les années 1860-1870, le développement de l’anthropologie à Genève contribue à soutenir l’empire en tant qu’idéologie. À partir des années 1860, des cours d’anthropologie sont organisés à l’Académie puis à l’Université ; ils rejettent l’idée d’une égalité réelle entre les groupes humains et cherchent à donner du crédit à celle d’une supériorité européenne. En parallèle, des collections anthropologiques sont établies dans les musées de la ville grâce au soutien des empires et de leurs infrastructures. Le Musée académique, puis à partir des années 1870, le Musée d’histoire naturelle et le Musée des missions, réunissent des collections de restes humains et d’artefacts, en partie spoliés par le biais de réseaux missionnaires et de circuits commerciaux. Ces pratiques sont perpétuées au 20e siècle, à la fois par le Laboratoire d’anthropologie de l’Université de Genève, créé en 1919, et par le Musée d’ethnographie, autonome depuis 1922. Les deux institutions sont réunies par Eugène Pittard en 1938.
Caroline Montebello
Boîtes de plaques de verre classées par thèmes ou régions du monde Supports de cours en anthropologie dispensés à l’Université de Genève entre 1900 et 1965 par les Professeur-e-s Eugène Pittard et Marguerite Lobsiger-Dellenbach Reproductions de cartes, d’ouvrages de référence ou de photographies de terrain Archives du MEG
Avertissement : Certains contenus présentent des images ou des termes à caractère raciste et discriminant.
Ce sont des témoins historiques de la pensée hégémonique occidentale.
Leur présence est signalée par ce symbole.
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Janus [geste 5]
Mathias C. Pfund. 2024 Sans titre [Tête d’Eugène Pittard (1867-1962)], Luc Jaggi, 1969, bronze, collections du MEG, Inv. ETHEU 068890, et du FMAC, Inv 1969-009 (refonte de 1985) ; base en acier, réalisée avec l’aide de Robin Gabriel
©Photo Johnathan Watts/MEG
Deux versions de la tête d’Eugène Pittard par Luc Jaggi. Inaugurée devant le MEG en 1969, l’œuvre originale fut volée en 1985 et une nouvelle fonte fut alors réalisée. Ce n’est qu’en 2023, à l’occasion de l’exposition Mémoires. Genève dans le monde colonial, que l’oeuvre est inscrite à l’inventaire des collections européennes, sous un nouveau numéro : ETHEU 068890. Mettant à mal l’unicité de l’œuvre, les têtes sont réunies sur un même socle en métal et disposées de façon à évoquer un bertillonnage.
M. C. Pfund
Eugène Pittard (1867-1962) par Taline Garibian [PDF 0.7 Mo]

Caricatures représentant Eugène Pittard
Auteur-rice non documenté-e
Date et publication inconnues.
Reproductions
Archives du MEG

Eugène Pittard tire profit du trafic de restes humains entrepris dans les colonies britanniques. En 1924, le South African Museum lui prête une collection d’ossements attribuée à la population Khoisan, en partie décimée lors de la colonisation néerlandaise, puis britannique du sud de l’Afrique aux 18e et 19e siècles. La collection, constituée notamment par l’exhumation irrégulière de cadavres, se trouve au centre des études du laboratoire à l’université entre 1924 et 1948. C. Montebello